"Il se trouve que les oreilles n'ont pas de paupières" (P. Quignard)
Juste le tympan peau de résonance. Paroi ouverte aux sons. Difficile alors de faire abstraction du grésillement qui entoure. "Faire abstraction" : comment faire d'un grésillement une abstraction ? Quignard toujours (grand organiste) dans La haine de la musique écrit : "Seule la musique est déchirante." Il serait alors possible de chercher cette abstraction là. Mais celle-là nous trouve. On ne la trouve pas. Elle m'a trouvé à deux reprises ; je ne sais s'il faut dire seulement tant l'expérience ouvre tout grand. La première : quelques notes de flûte à un moment de la huitième symphonie de Schubert, l'inachevée. Un point d'acmée que je n'ai entendu que dans l'interprétation de Sir Solti. Expérience incroyable d'un sentiment de totale désorientation tout en se disant (pauvres mots) : j'y suis. La seconde : les premières mesures, premiers souffles de la voix de Kathleen Ferrier ouvrant les Kindertotentlieder. Rien d'autre que les larmes d'un vertige intérieur.
Schubert plus que tout autre m'a donné d'entrevoir le monde, quelque chose comme l'énergie du monde. C'est romantique mais c'est ça.
Mahler et la voix de Kathleen Ferrier m'ont donné ce point de contact au plus intime.
Après, dans la réitération de l'écoute, quelque chose agit encore, bien sûr, mais il me semble que ce ne serait qu'une mémoire de la déchirure, une cicatrice un peu frottée que d'autres voix éveillent : Beth Gibbons (Portishead), PJ Harvey, Sidsel Endresen, Alela Diane, Jeanne Lee, par exemple.
Je pensais, en commençant, écrire ma "haine" de la musique déambulatoire sur MP 3,4, 12 ou sur Ipod, I phone, I va s'taire, du grésillement beatique des oreillettes, de l'isolement social de ceux qui écoutent et qui m'emmerdent dans les trains ou de ceux qui discutent avec ça dans les oreilles, de la pauvre musique crachouillée dans la rue par des haut-parleurs miteux. Je pensais dire mon incompréhension de la musique comme animal de compagnie, toutou partout emmené, je pensais dire mon étrangeté à cela. La musique m'a porté ailleurs.
Mais peut-être avons-nous tous plus ou moins conscience de cela, que la musique est déchirante et que nous attendons cela d'elle (l'en-plus de tout le reste qu'elle offre), comme il peut y avoir l'attente de l'amour qui tombe où et quand on ne l'attend pas.
Si les oreilles n'ont pas de paupières, dans (et non pas face, l'oreille est 3D) l'inouï, il reste l'évanouissement, paupière de la conscience.
Schubert plus que tout autre m'a donné d'entrevoir le monde, quelque chose comme l'énergie du monde. C'est romantique mais c'est ça.
Mahler et la voix de Kathleen Ferrier m'ont donné ce point de contact au plus intime.
Après, dans la réitération de l'écoute, quelque chose agit encore, bien sûr, mais il me semble que ce ne serait qu'une mémoire de la déchirure, une cicatrice un peu frottée que d'autres voix éveillent : Beth Gibbons (Portishead), PJ Harvey, Sidsel Endresen, Alela Diane, Jeanne Lee, par exemple.
Je pensais, en commençant, écrire ma "haine" de la musique déambulatoire sur MP 3,4, 12 ou sur Ipod, I phone, I va s'taire, du grésillement beatique des oreillettes, de l'isolement social de ceux qui écoutent et qui m'emmerdent dans les trains ou de ceux qui discutent avec ça dans les oreilles, de la pauvre musique crachouillée dans la rue par des haut-parleurs miteux. Je pensais dire mon incompréhension de la musique comme animal de compagnie, toutou partout emmené, je pensais dire mon étrangeté à cela. La musique m'a porté ailleurs.
Mais peut-être avons-nous tous plus ou moins conscience de cela, que la musique est déchirante et que nous attendons cela d'elle (l'en-plus de tout le reste qu'elle offre), comme il peut y avoir l'attente de l'amour qui tombe où et quand on ne l'attend pas.
Si les oreilles n'ont pas de paupières, dans (et non pas face, l'oreille est 3D) l'inouï, il reste l'évanouissement, paupière de la conscience.
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